Érigée en plein cœur du paysage champêtre du piémont laurentien, l’église de Saint-Léonard de Portneuf rappelle le développement du territoire qui s’opérait toujours plus au nord à la fin du 19e siècle dans la région. Alors que les familles s’établissent de plus en plus loin des noyaux villageois, Monseigneur Louis-Nazaire Bégin (1840-1925) consent à la demande de créer une nouvelle paroisse. C’est ainsi que la paroisse de Saint-Léonard-de-Port-Maurice[1] est érigée canoniquement le 14 décembre 1897, par détachement de Saint-Raymond-Nonnat. 

Puisque la raison première de la requête d’une nouvelle paroisse est l’éloignement des habitants du secteur de l’église de Saint-Raymond, on s’empresse de se mettre à l’œuvre afin d’éviter aux fidèles de devoir se déplacer plus longuement pour se rendre à l’office. Durant l’hiver, l’architecte Joseph-Georges Bussières (1869-1916) conçoit les plans de l’édifice et l’année suivante, en 1898, l’église de brique rouge s’élève sur un terrain offert par deux paroissiens, Cléophas Lesage et Victor Jobin[2]. Le 20 novembre, l’heure est déjà à la bénédiction de l’église, alors qu’aucun presbytère n’est encore construit pour accueillir le curé. À défaut d’un logis, celui-ci réside donc dans la sacristie en attendant! Le presbytère, construit en 1904, complète le noyau religieux qui comprend également l’église et le cimetière aménagé en 1900. 

Au début du 20e siècle, quelques travaux et ajouts de parachèvement sont faits. Le 24 février 1902, on fait l’installation d’une cloche fondue en 1884 par Thomas Mears, maître fondeur de Londres (Angleterre). Cette cloche de 1630 livres est remplacée le 7 juin 1914 par trois cloches, nommées Jésus, Marie et Joseph[3], provenant de la fonderie Paccard d’Annecy-le-Vieux en France. C’est également en juin 1914 que la finition de l’intérieur de l’église est complétée, alors que d’importants travaux avaient été entrepris en 1912 pour agrandir le jubé et en construire un deuxième au-dessus. 

Par la suite, peu de modifications ont été apportées[4]. Les ajouts les plus significatifs sont l’installation de la lumière électrique en 1927 et l’acquisition de l’orgue Casavant en 1931, puis d’un orgue Rodgers en 1990 qui sera placé au second jubé. Également, un portique central est ajouté à la façade vers le milieu du 20e siècle. 

L’ensemble institutionnel de Saint-Léonard a conservé une grande authenticité et a été cité immeuble patrimonial par la municipalité en 2000. En plus de l’église, le noyau religieux comprend le cimetière arboré dans lequel un chemin de croix en granit a été installé en 1917, un monument du Sacré-Coeur en 1919 et un charnier[5] construit en 1924. Le presbytère, construit en 1904 selon les plans des architectes David Ouellet (1844-1915) et Pierre Lévesques (1880-1955)[6] et dont le parement est en harmonie avec l’église, change quant à lui de vocation en 1992 pour devenir une maison d’accueil pour toxicomanes, avant d’être vendu en 2005. 

L’architecture sobre de l’église est typique des églises de colonisation, avec son plan rectangulaire, son chœur en saillie à chevet plat prolongé par la sacristie[7] et son clocher unique. Ces caractéristiques rappellent d’ailleurs les églises du Régime français et se conjuguent aux éléments architecturaux du renouveau classique tels les oculus, les pilastres et le retour de corniche de la façade. Bien que la pierre soit abondante dans la région, on opte pour un revêtement de brique rouge qui s’avère moins coûteux à l’époque et qui apporte un contraste intéressant avec la tôle de la toiture. À l’intérieur, la nef à un vaisseau qui est complétée par deux tribunes arrière est surmontée d’une voûte en arc en plein cintre et les fenêtres hautes offrent une belle luminosité au temple. 

L’église de briques rouges à l’apparence modeste depuis l’extérieur réserve un décor particulièrement soigné et possède même une particularité dont peu d’églises peuvent se targuer dans la région. En effet, le maître-autel est surmonté d’un demi-baldaquin, ce qui donne au chœur un caractère raffiné et somptueux qui contraste avec le revêtement en lattes de bois de la nef qui rappelle l’église de colonisation. L’ornementation du chœur et de la voûte ajoute au caractère distingué du décor intérieur. Ayant subi peu de modifications majeures, l’église possède encore, en plus du maître-autel et de son baldaquin, deux autels latéraux, la chaire et une partie de la balustrade. 

Le temple possède également, en plus d’un chemin de croix érigé le 25 juin 1899, un remarquable ensemble statuaire réalisé par Louis Jobin (1845-1928) de Saint-Raymond. Cette représentation de la passion du Christ qui comporte trois statues de grande dimension, soit Le Christ en croix, la Vierge et Saint Jean, avait été installée dans le cimetière en 1917 et a été restaurée en 1980 pour être mise en valeur dans la nef. Dans le choeur se trouvent deux triptyques de vitraux[8] représentant d’une part le Sacré-Coeur, Saint Raymond et l’Enfant prodigue, et d’autre part la Sainte Famille, Sainte Thérèse et le Curé d’Ars. Enfin, quatre tableaux complètent l’art religieux de l’église, soit l’Assomption et Saint Léonard de Port-Maurice peints en 1918 par G. Dumonchaux, et Saint Joseph et l’Apparition du Sacré-Coeur à Marguerite-Marie Alacoque, toutes deux non signées. 

À l’instar de plusieurs églises dans la région, des réflexions sont en cours quant à l’avenir du bâtiment.

Nous tenons à remercier M. Fernand Hardy et Mme Linda de la Chevrotière pour leur aide et leur collaboration dans la réalisation de ce projet.

75e anniversaire de St-Léonard de Portneuf, 1899-1974. 1974. Québec (province): Éditeur non identifié.

Conseil du patrimoine religieux du Québec. 2023. « Église de Saint-Léonard-de-Portneuf ». Inventaire des lieux de culte du Québec. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.lieuxdeculte.qc.ca/fiche.php?LIEU_CULTE_ID=6103.

LABRECQUE Paul et Hélène BOURQUE. 2000. Les églises et les chapelles de Portneuf. Cap-Santé, Québec : MRC de Portneuf.

MRC de Portneuf. 2023. « Saint-Léonard-de-Portneuf ». Municipalités constituantes. Consulté le 12 décembre 2023. En ligne: https://portneuf.ca/amenagement-territoire/municipalites-constituantes/saint-leonard-de-portneuf/.

Paroisse Saint-Raymond-du-Nord. 2019. « L’Église de Saint-Léonard ». Consulté le le 30 novembre 2023. En ligne: https://psrdn.org/histoire_saint_leonard.html.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Bégin, Louis-Nazaire ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=9229&type=pge.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Bussières, Joseph-Georges ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=7311&type=pge.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Cimetière de Saint-Léonard ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=114929&type=bien.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Église de Saint-Léonard ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=125163&type=bien.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Jobin, Louis ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=7640&type=pge.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Lévesque, Pierre ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=7736&type=pge.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Monument du Sacré-Cœur ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=114930&type=bien.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Noyau religieux de Saint-Léonard-de-Portneuf ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=93394&type=bien.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Ouellet, David ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=7830&type=pge.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Pagé, Élisée ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=7832&type=pge.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Presbytère de Saint-Léonard ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=97779&type=bien.

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. 2013. « Saint-Hilaire, Joseph ». Ministère de la Culture et des Communications. Consulté le 30 novembre 2023. En ligne: https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=7946&type=pge.

TRÉPANIER, Paul. 1991. « J.-Georges Bussières et les églises Portneuvoises ». Continuité (50): 37-42.

Ville de Québec. 2023. « Bussières, Joseph-Georges ». Répertoire du patrimoine bâti. Ville de Québec. Consulté le 27 décembre 2023. En ligne: https://www.ville.quebec.qc.ca/citoyens/patrimoine/bati/thesaurus.aspx?tid=2228897.

 [1] C’est Monseigneur Louis-Nazaire Bégin qui suggère le nom de Saint-Léonard-de-Port-Maurice à la nouvelle paroisse, puisqu’il avait assisté à la canonisation de ce dernier en 1867 à Rome.

[2] L’entrepreneur Joseph Saint-Hilaire (1862-1943) supervise les travaux de construction en 1898. 

[3] Ces cloches pèsent respectivement 1550 livres, 1100 livres et 800 livres. 

[4] Bien que ceux-ci s’harmonisent avec l’ensemble du décor intérieur, les bancs d’origine ont été remplacés. Ils se trouvent maintenant au sous-sol de l’église. 

[5] Le charnier est le lieu où étaient entreposées les dépouilles avant d’être mises en terre. 

[6] L’entrepreneur de Saint-Raymond Élisée Pagé obtient le mandat de construire le presbytère. Le presbytère a été construit selon le modèle « Four Squares » vernaculaire américain, soit ayant un volume cubique. 

[7] La sacristie suit un plan rectangulaire prolongé d’une abside à pans coupés. 

[8] Le facteur de ces vitraux est inconnu. 

Projet réalisé par

Équipe

DIRECTION TECHNIQUE
AARON BASS


RECHERCHE
LAURA TROTTIER

RÉVISION DES TEXTES
GABRIEL OUELLETTE

PHOTOGRAPHIE
DENIS BARIBAULT

VISITE PANORAMIQUE
EMY VALLIÈRES

INTÉGRATION WEB
MITJA LESNIK

Ce projet a été rendu possible grâce à